Témoignage pubié le 05 mai 2021

J’avais 7 ans et demi quand le Président Kennedy a été assassiné. A l’époque, je ne voyais la télévision que chez mes grands-parents et l’heure du « journal parlé » était sacrée! Chacun devait donc faire silence autour de la table, voir et entendre, à défaut d’écouter, ce qui concernait surtout les adultes! Les images qui m’ont le plus impressionnée durant cette période sont celles de la guerre du Vietnam qui généraient en moi une peur viscérale et les reportages sur l’assassinat de JFK. Mon esprit d’enfant ne pouvait comprendre que quelqu’un puisse tuer un homme comme celui-là. Il dénotait dans le panel des hommes politiques: jeune, beau, souriant, il représentait pour moi le père idéal…tel que la presse le montrait à ce moment. Comme beaucoup, je me suis intéressée à la saga Kennedy, le parcours de sa veuve, de ses enfants, l’assassinat de son frère, avant celui de Martin Luther King! Tant de malheur, de violence… Pourquoi? Quels enjeux permettent ou provoquent cela?

Lorsque j’ai commencé à m’intéresser à la psychogénéalogie, j’ai lu Nina Canault, Anne Ancelin Schützenberger et Elisabeth Horowitz… Dans la série d’ouvrages sur le sujet, celui concernant les Kennedy allait sans doute m’aider à comprendre le cheminement de cette famille hors du commun (Mais quelle famille ne le serait pas si l’on prenait la peine d’en étudier/analyser l’histoire sous cet angle?).

Il y a 3 ans, j’ai lu ce livre et j’y ai découvert des zones d’ombre que la presse avait préféré ignorer ou qui étaient parfois relatées événement par événement sans établir les liens utiles à une compréhension globale de cette histoire! Dernièrement, j’ai regardé le document «Il n’y a pas de Kennedy heureux» réalisé par Patrick Jeudy et j’ai redécouvert cette histoire selon un autre angle d’observation (les gouvernantes des enfants) et un autre média, les images d’archives! Quel choc émotionnel! Je connaissais l’histoire que j’avais lue dans la presse, dans le livre d’E. Horowitz et ce, à différentes périodes de ma vie. Peu d’anecdotes et d’événements relatés m’étaient inconnus, et pourtant, voir la sœur de JFK si belle, si heureuse de vivre et entendre que son père l’a fait lobotomiser pour ne pas courir le risque d’un scandale lié à sa vie amoureuse! (autorisé pour les garçons, pas pour les filles). Le lire m’avait choquée, le voir et l’entendre m’ont en plus attristée pour cette jeune femme sacrifiée sur l’autel de l’ambition familiale. Je savais aussi que JFK souffrait horriblement des séquelles de ses blessures de guerre, mais c’est la première fois que je le voyais à l’écran lourdement appuyé sur ses béquilles. Ces images m’ont rendu sa douleur plus tangible.

Ces constats m’ont troublée. Je suis une enfant de la seconde moitié du vingtième siècle, née avec l’avènement de la télévision qui était, durant mon enfance et mon adolescence, encore limitée. Nous écoutions aussi beaucoup la radio et notre génération apprenait encore à lire. Cela semble souvent un média ringard aux adolescents d’aujourd’hui! Pourtant, la puissance, l’impact des images et du son sont d’une force incroyable (la publicité l’a d’ailleurs si bien comprise). C’est pourquoi il me semble important de ne pas négliger ces médias dans nos travaux de psychogénéalogie. Dans nos recherches, n’oublions pas les photos, les films familiaux, les enregistrements des voix de nos parents, grands-parents et autres. N’oublions pas non plus les images d’actualité qui peuvent conforter, étayer les événements du roman familial. La charge émotive générée par l’évocation visuelle et/ou sonore des souvenirs peut mobiliser d’autres énergies pour la poursuite du travail.

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