Article pubié le 16 février 2016

Il n'y a pas de rapport sexuel

Jacques Lacan

95% des femmes s'emmerdent en baisant.

Georges Brassens

La sexualité est une véritable médecine préventive

Danièle Flaumenbaum

Au croisement de la psychanalyse et de la médecine chinoise, Dr Danièle Flaumenbaum, gynécologue et acupunctrice auteur du livre « Femme désirante, femme désirée » souligne le rôle central que les mères ont à jouer pour apprendre à leurs filles à vivre pleinement leur sexualité mais constate dans ses consultations que les femmes ont beaucoup de difficulté avec l'Homme, avec leur homme.

Forte d'une solide expérience, la gynécologue confirme que dans l'alchimie amoureuse, tendresse et plaisir confondus, l'homme devient le «tout» de la femme auquel elle se donne, s'abandonne. La femme aime son homme comme sa Mère (avec une majuscule), celle qui a comblé, au seuil de la vie, tout désir.

La clinique du cabinet de Danièle Flaumenbaum révèle (trop) souvent le clivage pathologique entre le cœur et le sexe, la tendresse et l'amour sexuel, voire une absence totale de sexualité. La médecine chinoise et le taoïsme, qui enseignent la fluidité et la circulation d'énergie entre les sexes, délivrent une leçon, dit que sans authentique sexualité, l'être est mutilé.

Il convient donc de rompre avec les clichés psys: la plupart des femmes ne projettent pas sur l’homme qu’elles aiment leur relation à leur père, mais à leur mère !

Pourquoi le plaisir, voire le désir, sont-ils si peu souvent au rendez-vous de la rencontre amoureuse ? Qu'elles aient 20, 30, 40 ou 60 ans, comment les femmes construisent-elles cette part essentielle de leur intimité ? Le droit au plaisir est socialement acquis, l'évidence que la sexualité fait partie de leur vie aussi, mais, de la théorie à la pratique, cela ne suit pas. Les femmes ne sont toujours pas préparées à savoir vivre leur sexualité. La pensée occidentale insiste peu sur le rôle de l'utérus dans le plaisir féminin, la médecine taoïste, en revanche, lui accorde une grande importance.

Les Chinois de la Chine ancienne, pour qui la sexualité est nécessaire à l'entretien de la vie, à l'épanouissement de l'esprit et à la prévention des maladies, ont décrit les trajets de l'énergie sexuelle. Selon la sexualité taoïste, l'utérus est le "chaudron alchimique", la caisse de résonance dans laquelle se rencontrent et s'unissent les forces masculines et féminines mais il faut pour cela que le corps de la femme accepte véritablement de s'ouvrir, ce qui est rarement le cas. Chez la plupart d'entre elles, les énergies se bloquent au fond du vagin, parfois même en y provoquant de vives douleurs.

Pouvoir s'ouvrir à l'homme qu'elle aime est pour la femme une question de transmission transgénérationnelle

Les petites filles ne peuvent rêver de devenir "maman" que si leur mère est heureuse de l'être. De la même façon, elles doivent pouvoir grandir en sachant que la sexualité qu'elles vivront quand elles seront grandes leur donnera du plaisir et des forces. Ce qui est loin d'être toujours le cas. C'est souvent cela que leurs mères ne leur ont pas appris! Les mères ont le souci d'aider leurs filles à devenir des femmes pensantes et autonomes mais elles n'ont pas intégré le rôle qu'elles avaient à jouer pour les aider à devenir des femmes sexuées. N'ayant pas reçu elles-mêmes cet héritage, le plaisir érotique n'a aucune place dans leur discours. On est ainsi passé de l'interdit au déni de la difficulté.

L'idéal, serait d'avoir des parents qui vivent pleinement leur sexualité et de grandir en sentant que cela fait partie de la vie. Le simple fait de grandir dans le même espace qu'une mère qui a du plaisir à faire l'amour suffit à assurer la transmission. Et quand ce n'est pas le cas, une mère doit savoir se dire à elle-même et dire à sa fille qu'elle lui souhaite de vivre sa sexualité avec plus de bonheur qu'elle n'en a eu elle-même. Dès l'enfance, une mère doit instruire sa fille du fait que plus tard elle aura du plaisir à accueillir l'homme qu'elle aime dans son sexe.

Transmission transgénérationnelle de la sexualité masculine

Même si l'homme aimé - et aimant - peut aider sa partenaire à s'ouvrir à lui, ce n'est pas à lui de construire la femme. Ce n'est pas à lui de la "porter", car elle risque alors de l'aimer comme elle aimerait une mère, et cet amour-là n'est pas sexué. De plus, les hommes ont leurs propres difficultés: eux aussi, souvent, sont restés coincés dans les modèles de leur père ou de leur grand-père, dans une sexualité clivée entre "la maman et la putain" qui ne facilite pas toujours leur épanouissement. Cela ne veut pas dire qu',en tant que pères, ils n'ont aucun rôle à jouer dans la construction sexuelle de leurs filles: pour pleinement savoir qu'on est une femme, il faut aussi le découvrir dans le regard d'un homme et en premier lieu dans celui d'un père.

Note

Cet article s'est inspiré de l'article de Catherine Vincent paru dans l'édition du Monde du 17 mai 2006.

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